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Sujet: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Lun 14 Jan - 20:15
J'ai longtemps hésité à ouvrir un sujet sur le Concerto pour clarinette KV 622 de Wolfgang Amadeus Mozart.
Cette oeuvre est tellement unique dans l'histoire de la clarinette qu'une espèce de vénération respectueuse s'impose
Néanmoins, je suis tombé par hasard sur un document qui permet d'aborder le sujet de manière un peu originale.
En effet, j'ai trouvé quelque chose sur le site de l'éditeur de partitions G. Henle Verlag qui a édité ce Concerto (en réduction pour clarinette et piano).
Voici ce qu'on peut lire en préface de cette édition :
Citation :
Préface
Anton Stadler (1755–1812), à qui Mozart avait donné le surnom humoristique de Nàtschibinìtschibi (lettre du 15 janvier 1787 à Jacquin), passait en son temps pour être un remarquable clarinettiste et virtuose du cor de basset, même en dehors de la ville de Vienne. Nous ne savons pas exactement à quelle date remontent ses relations amicales avec Mozart. Ils se connaissaient sans doute déjà en 1784, lorsque Stadler donna une «grande musique pour instruments à vents» de Mozart (peut-être la «Gran Partita» K. 361) dans le cadre d’une «académie» à Vienne. Mais ils se produisirent pour la première fois ensemble au plus tard le 20 octobre 1785, au cours d’un concert de charité des Loges maçonniques de Vienne. Stadler, en tant que virtuose éminent, influença également l’évolution de la facture de la clarinette. Il fit élargir l’entendue de la clarinette traditionnelle, en y ajoutant quatre demi-tons au grave. Il pouvait de ce fait jouer sur son instrument jusqu’au Do (noté une octave plus bas en clé de fa), sonnant La1. Mozart se laissa inspirer par le nouvel instrument de Stadler – qui ne prit que plus tard le nom de clarinette de basset – et utilisa dans plusieurs compositions les nouvelles possibilités qu’il offrait. L’air n° 24 de Ferrando «Ah ! lo veggio» dans Così fan tutte K. 588 – composé fin 1789/début 1790 – est la première oeuvre de Mozart qu’il nous soit possible de dater, dans laquelle il eut recours à cet instrument. Le Quintette de Stadler K. 581 et les fragments de Quintettes pour clarinette en si bémol majeur K. 516c (Anh. 91) et en la majeur K. 581a (Anh. 88.) prouvent toutefois qu’il aurait pu utiliser la clarinette de basset quelques mois plus tôt. Par la suite, il l’utilisa également comme instrument soliste: l’air n° 9 de Sesto «Parto, parto» dans La clemenza di Tito K. 621 comporte une partie soliste obligée pour cet instrument, qui requiert une grande virtuosité. On dit que Stadler se rendit à Prague tout exprès pour participer à la création de cet opéra. Le Concerto pour clarinette en la majeur K. 622, la dernière composition purement instrumentale de Mozart, a été écrit pour clarinette de basset, ainsi que nous l’apprenons en lisant une critique parue dans la revue Allgemeine Musikalische Zeitung de mars 1802 (cf. reproduction en fac-similé en appendice 2 de cette édition). L’autographe est perdu. Mozart omit malheureusement de noter la date de cette composition dans le Catalogue manuscrit qu’il tenait de toutes ses oeuvres, mais le Concerto fut certainement terminé entre le 7/8 octobre («puis j’ai instrumenté tout le Rondò de Stadler») et le 15 novembre 1791, où Mozart note la composition suivante dans son Catalogue d’oeuvres. Le papier d’un fragment autographe K. 584b (621b) qui nous est parvenu, confirme toutefois que Mozart aurait pu commencer quelques années plus tôt – dès 1785 – à travailler à ce concerto. Le fragment comporte les mesures 1–199 du premier mouvement et est noté pour cor de basset en sol et orchestre. Outre quelques divergences, qui ne sont pas sans signification, cette version écartée par le compositeur se différencie de la version définitive par la tonalité (sol majeur) et l’instrumentation orchestrale (sans bassons). Sur le manuscrit, qui se limite principalement à la partie mélodique et à la partie de basse, on constate que Mozart décida à partir de la mesure 180 de changer l’instrument soliste au bénéfice de la clarinette de basset en la, et donc de changer la tonalité de la composition en la majeur. Après la mort de Mozart, trois éditions en parties séparées parurent presque en même temps en 1801/1802, chez Breitkopf & Härtel (Leipzig), André (Offenbach) et Sieber (Paris). Il est aujourd’hui impossible de savoir dans quel ordre elles parurent. Du fait de certains détails, il est possible de les séparer en deux branches généalogiques de même poids: les éditions de Breitkopf & Härtel et de Sieber sont tellement similaires, jusqu’à la mise en page, que l’on peut affirmer que l’une d’entre elles (Sieber) a été copiée sur l’autre (Breitkopf & Härtel). L’édition d’André fait preuve par certains détails d’une indépendance incontestable par rapport aux deux autres publications du texte (par exemple confusions nharmoniques de certaines notes, articulations). Curieusement, aucune des trois éditions ne propose la partie de soliste pour clarinette de basset – comme on aurait pu s’y attendre – mais dans un arrangement pour la clarinette traditionnelle sans registre de basset, qui concorde dans toutes ces éditions. Aucune d’entre elles ne remonte donc directement à l’autographe perdu de Mozart, mais toutes trois reposent sans doute sur une même adaptation faite par un inconnu, qui aurait été distribuée en copies manuscrites aux environs de 1800 (dans les pays de langue allemande). La cause des différences entre l’édition d’André et celles de Breitkopf & Härtel et Sieber ne doit donc pas être imputée au manque d’exactitude de la gravure musicale, mais plutôt aux copistes responsables des manuscrits ayant servi à cette gravure.
Au sujet de l’édition (passage omis)
Au sujet de la reconstruction de la partie de clarinette de basset
Comme la partie de soliste pour clarinette de basset n’est publiée que de façon faussée dans les éditions en parties séparées, nous devons avoir recours à d’autres renseignements pour procéder à la reconstruction. Le critique anonyme de l’article paru dans AMZ, que nous avons cité plus haut, compare l’édition de Breitkopf & Härtel pour clarinette avec une partition manuscrite pour clarinette de basset dont il dispose (mais qui ne nous est pas parvenue), et cite à titre d’exemple onze passages, où les notes de basset de la partie soliste ont été éliminées dans l’édition imprimée, pour les rendre jouables sur une clarinette traditionnelle. Il ajoute à ses remarques informatives concernant ces passages: «Et de très nombreux passages ont été transposés et modifiés de cette sorte.» L’authenticité de ses dires est corroborée par le fragment autographe, même si deux divergences intéressantes entre l’autographe et les éditions gravées (1er mouvement, mes. 96–98 clarinette, mes. 195–200 violons), concernant le renversement à l’octave, confirment que les deux versions sont indépendantes l’une de l’autre. La reconstruction du registre de basset dans des passages autres que les onze cités dans le commentaire s’avère plus difficile. Pamela Weston a été la première à faire référence à un arrangement du Concerto pour quintette avec piano, de la main de Christian Friedrich Gottlieb Schwencke (1767–1822), paru chez Johann August Böhme à Hambourg. L’annonce de cette édition n’est toutefois parue que 20 ans après la mort de Mozart, le 19 juin 1811, dans le Allgemeiner Anzeiger der Deutschen; elle ne saurait donc avoir été publiée du temps des trois éditions citées ci-dessus, et encore moins avant elles. Schwencke était le successeur de C. P. E. Bach comme cantor de la Ville de Hambourg. Son arrangement du Concerto pour clarinette de Mozart en quintette avec piano est très intéressant pour la reconstruction parce que la partie de piano présente des similitudes étonnantes avec les indications citées dans l’AMZ, du point de vue du renversement à l’octave. La comparaison prouve que l’arrangement de Schwencke correspond à l’article de l’AMZ, à l’exception des mesures 232–238 du Rondo. Et ceci n’est nullement le fait du hasard. Il est probable que Schwencke ait tenu compte de cet article de l’AMZ pour faire son arrangement. Comme il était depuis 1799 auteur de comptes rendus pour cette revue, il semble même possible que l’auteur anonyme de la critique ait été Schwencke lui-même et qu’il ait donc eu accès à la partition manuscrite du Concerto avec clarinette de basset. (On rapporte même qu’un manuscrit du Concerto se trouvait dans la succession de Schwencke.) Il manque toutefois les preuves pour étayer cette thèse, de sorte que la valeur de son arrangement pour servir de source ne peut pas être prouvée de nos jours. Notre reconstruction du registre de basset repose toutefois sur l’arrangement de Schwencke, car il est convainquant sur le plan musical. Les renversements à l’octave empruntés à l’arrangement de Schwencke ne sont pas mis en évidence dans notre édition. Seuls ceux qui sont cités dans l’AMZ sont marqués pour faire ressortir leur caractère de «version autorisée». Pour terminer, l’auteur adresse ses remerciements aux bibliothèques citées dans les Bemerkungen. Nous remercions aussi les clarinettistes qui, au cours de discussions et de conversations, nous ont fourni de précieux éléments informatifs pour la mise au point de cette édition.
Munich, automne 2003 Henrik Wiese
Cet article nous montre tout le travail d'étude nécessaire à l'édition d'une telle oeuvre
Je trouve cela impressionnant
A vous de poursuivre sur le sujet, en réponse directe ou de manière plus traditionnelle
joachim Allegro
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Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mar 15 Jan - 19:42
Très intéressant, cet article qui nous parle de la genèse du concerto et de ses différentes éditions. Si Mozart avait commencé ce concerto, en version cor de basset dès 1785, pourquoi a-il-arrêté ? Et pourquoi a-t-il repris une oeuvre inachevée pour en changer la tonalité et l'instrument ? C'est il me semble un cas unique chez Mozart, où les oeuvres inachevées sont bel et bien restées inachevées (le cas du concerto pour hautbois transformé en concerto pour flûte K 314 est une transcription, c'est donc autre chose).
Quoi qu'il en soit, ce concerto pour clarinette est absolument inégalé, c'est le chef d'oeuvre de la musique pour clarinette (pour moi en tout cas ).
Stadler Administrateur
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Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mar 15 Jan - 21:03
joachim a écrit:
Si Mozart avait commencé ce concerto, en version cor de basset dès 1785, pourquoi a-il-arrêté ? Et pourquoi a-t-il repris une oeuvre inachevée pour en changer la tonalité et l'instrument ?
Peut-être l'a-t-il repris pour clarinette en La de basset pour Anton Stadler, puisque c'est déjà l'instrument de Quintette KV 581 ?
Snoopy Allegro
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Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 13 Fév - 19:04
Verlag c'est le must en matière d'éditeur de partitions. Malheureusement un peu cher en général.
joachim Allegro
Nombre de messages : 289 Age : 78 Localisation : Nord Date d'inscription : 11/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Ven 16 Mai - 14:18
Une version du merveilleux 2ème mouvement à la clarinette de basset
Nombre de messages : 1328 Age : 54 Localisation : Gembloux (Belgique) Date d'inscription : 07/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 4 Juin - 14:44
Avec l'aimable autorisation de Jean-Pierre 'alias JPS1827' qui alimente le Forum de Ron consacré à Mozart, je reproduis ici la substance de ses récentes interventions :
JPS1827 a écrit:
Ce concerto est intimement lié au quintette avec clarinette K 581, également en la majeur, dont il possède la même délicatesse et le même ton de méditation individuelle parfois nostalgique mais allant vers l'apaisement, et de tendresse fraternelle (Brigitte Massin parle d'un chant de la fraternité, et aussi du conflit entre la nuit (à propos du thème en la mineur du solo dans le premier mouvement) et la lumière (mais je ne partage pas ce dernier point de vue).
...
Le premier mouvement du concerto a deux traits remarquables : - l'orchestre comporte, outre les cordes, deux flûtes, deux bassons et deux cors. En outre, on voit sur la partition une partie orchestrale de clarinette, notée dès la première exposition sur la même ligne que celle de la clarinette solo. La préface de la NMA considère ce problème, mais elle est en allemand et je n'ai pas réussi à la comprendre. Apparemment cette partie orchestrale est jouée habituellement par un autre clarinettiste (merci à ceux qui peuvent donner des précisions sur ce point) - il n'a pas de cadence, toute la partition étant "obligée" à l'exception de deux points d'orgue.
Outre la version du Magic coffret qui me paraît honnête sans plus, avec une sonorité qui manque parfois de rondeur et de souplesse, j'ai redécouvert dans ma discothèque la version de Richard Vieille, avec les Archets de Paris, dirigé par Armin Jordan, parue chez Calliope, très bonne à mon avis, et surtout une version (distribuée par Le Monde en 2006) qui me plaît beaucoup, par Martin Fröst accompagné de l'Amsterdam Sinfonietta sous la direction de Peter Oundjian. Martin Frost joue une clarinette de basset moderne, et suit donc la partition reconstituée pour clarinette de basset de la NMA.
La structure du premier mouvement est assez difficile à établir. Elle n'est pas très lointaine de celle de plusieurs des derniers concertos pour piano, dans lesquels l'orchestre expose les deux thèmes classiques dans le ton principal, avant que le soliste ne rentre sur un troisième thème qu'il est souvent le seul à jouer, comme un prélude à la seconde exposition. Ici on retrouve une structure à trois thèmes, mais deux d'entre eux sont à peu près identiques et l'ordre adopté est différent
Le premier thème (appelons le A) est neutre et primesautier, en 8 mesures, 4 mesures
puis une première réponse de 4 mesures ; les quatre premières mesures sont répétées, et la deuxième réponse commençe à faire voyager le thème, cette première section se terminant par un motif de ralliement optimiste et plein d'entrain
avant les trois accords de mi majeur (dominante de la majeur) à la mesure 24. En fait de deuxième thème, on entend alors une variante du premier thème, exposée également en la majeur (comme il est d'usage dans la première exposition, cf le fil "Forme générale des concertos"), traité cette fois de façon contrapuntique, mais qui reste reconnaissable comme un second thème, bien que frère jumeau du premier (appelons le B), puisqu'il passera bien en mi majeur dans la 2ème exposition, puis de nouveau en la majeur lors de la réexposition, ce qui caractérise les seconds thèmes en général.
A la mesure 37 un motif ascendant
nous entraîne irrésistiblement vers la conclusion à la tonique (en la majeur) de cette première exposition dont les dernières mesures sont marquées par l'apparition d'un motif qui reproduit l'inverse du motif des mesures 3 et 4.
La clarinette rentre alors et expose le thème A une fois sur 8 mesures, puis accompagne de façon très élégante et très belle la reprise du thème A à l'orchestre, selon une véritable variation ornementale. Les mesures 76 et 77 concluent en s'éloignant et en introduisant le ton de la confidence pour le troisième thème en la mineur (appelons le C),
ce thème, qui sera confié exclusivement à la clarinette, commence sur un ton beaucoup plus intime (c'est là que j'entends une méditation nostalgique), puis devient immédiatement d'une grande liberté, déployant de belles arabesques romantiques qui font penser à Weber, la mélodie voyageant loin sur un accompagnement d'orchestre particulièrement raffiné.
A partir de la mesure 115, l'écriture fait alterner des passages dans la clarine avec des répliques dans le chalumeau, donnant l'impression d'un dialogue entre deux instruments
ce dialogue est plus nostalgique, la fin du voyage approche et cette section se termine sur un point d'orgue à la clarinette solo. Alors arrive la reprise du thème B qui va conclure à nouveau cette seconde exposition à la mesure 171, en mi majeur cette fois. Alors que la 2ème exposition était, comme souvent dans les concertos de Mozart, un véritable "développement", le développement proprement dit commence mesure 172 et est d'une longueur inusitée de 78 mesures. Mêlant des fragments du premier et du troisième thème (examiner la remarquable construction des mesures 172 à 176 qui juxtapose aux deux premières mesures du thème A, le début caractéristique du thème C), il aboutit à un motif en noires répétées à la mesure 192,
simple distension d'un accompagnement en croches répétées des mesures précédentes, avant la reprise d'un fragment de C, allant vers un fragment assez Sturm und Drang qui commence à la mesure 227
ce fragment s'arrête brusquement sur un forte subito à la mesure 239
et alors reprend le motif de ralliement qui concluait le thème A, triomphe de la clarté et de l'optimisme, pour terminer le développement. La réexposition commence à la mesure 251 et réexpose A en la majeur, C en la mineur (thème du soliste), puis B en la majeur cette fois pour terminer dans l'allégresse.
Ce mouvement assez long et complexe met en scène les doutes, les interrogations et le cheminement individuel confiés à la partie du soliste, qui se ralliera finalement aux motifs de la fraternité universelle exprimés dans les thèmes A et B. Malgré sa relative longueur, il semble couler de source d'un bout à l'autre dans un esprit de quasi improvisation, la structure ne se révélant que lors d'écoutes itératives à mes oreilles d'amateur (elle était peut-être plus évidente pour les auditeurs du 18ème siècle).
Dernière édition par Stadler le Mer 4 Juin - 14:50, édité 1 fois
Stadler Administrateur
Nombre de messages : 1328 Age : 54 Localisation : Gembloux (Belgique) Date d'inscription : 07/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 4 Juin - 14:45
JPS1827 a écrit:
L'adagio en ré majeur (ton de la sous-dominante de la majeur, le passage à la sous-dominante étant habituel mais non systématique pour les mouvements lents mozartiens) est évidemment de forme lied puisqu'il expose d'abord une belle cantilène chantée par le solo en deux fragments de huit mesures repris à chaque fois par l'orchestre. Puis survient un long passage très libre d'esprit, où la partie de clarinette prend l'allure d'une improvisation à la fin de laquelle les larges traits, chromatique puis diatoniques, de la clarinette semblent englober tout l'espace musical.
Cette section aboutit à un point d'orgue avant la reprise du thème initial sans répétitions, qui sera suivie d'une très belle coda de la clarinette solo.
Mais de façon particulièrement sensible ici, bien que cela vaille bien sûr pour toutes les formes avec reprise finale d'un thème initial, l'artiste qui chantait au début a connu une expérience dont il est sorti différent ; il est toujours lui-même mais n'est plus le même. Entre les phrases strictement mesurées du cheminement des 32 mesures initiales et de la reprise du thème, le temps s'est écoulé différemment de la mesure 33 à la mesure 59, plus irrégulièrement, en s'intégrant en quelque sorte au chant de l'artiste et en épousant ses fluctuations émotives. Dans une optique interprétative, je m'aventure (sans avoir cherché à savoir ce que dit JVHocquart, que je lirai après avoir fini ce commentaire) en disant que le premier mouvement a permis à l'homme de sortir de ses doutes et de ses tourments pour rejoindre la fraternité maçonnique, et que le second lui permet de se modifier en devenant lui-même un élément serein et confiant de cette fraternité. Ce n'est pas seulement sa confiance dans un avenir plus lumineux qu'il affirme, il devient lui-même un des éléments constituants de cet avenir qui sera mis en scène dans le finale, désormais débarrassé de tout nuage. Je trouve particulièrement émouvant que ce voyage qui aboutit à une sorte de synthèse du "Sturm und Drang" et de l'"Aufklärung" soit confié à "l'instrument de l'héroïque amour" si cher à Stadler.
Stadler Administrateur
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Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 4 Juin - 14:47
JPS1827 a écrit:
Le finale est un rondo-sonate relativement développé. Le ton général est celui de l'allégresse, que deux courts épisodes en mineur n'arrivent pas à assombrir. La forme est de type ABACBA (au lieu du régulier ABACABA, Mozart évitant une répétition du thème initial après le passage central). L'exposition du thème A se fait en trois parties jusqu'à la mesure 56 ; le thème est très beau dans sa carrure symétrique et tonale simple, alors que sa distribution rythmique et le discret et délicat chromatisme de passage à la 4ème mesure juste avant le repos sur la dominante sont typiques du génie mozartien. Il est repris par l'orchestre avant un divertissement du solo qui garde le côté enjoué et lumineux, de la mesure 17 à 23, puis suivi d'un passage de transition qui fait déjà entendre des éléments rythmiques du couplet (2ème thème) à venir. Le début du second thème B survient à la mesure 57, exposé par la clarinette dans un esprit toujours optimiste, puis relayé par l'orchestre d'abord en la majeur, puis en mi mineur, ce qui lui confère un aspect nostalgique tout nouveau sur une basse chromatique descendante qui fait une étonnante irruption dans ce mouvement.
Cette ombre ne dure pas et fait place de nouveau à de gaies arabesques de la clarinette qui débouchent sur une transition très raffinée, avec des modulations et des gammes chromatiques conclusives juste avant la reprise du thème A. Le 2ème couplet ou élément C arrive à la mesure 137, exposé en fa dièse mineur par la clarinette, d'abord dans l'aigu, puis dans le registre grave, avec le caractère d'un cheminement plus réfléchi dans un nouveau paysage plus automnal. La conclusion de cet épisode comporte de grandes oppositions de registre de la clarinette puis surtout une géniale évocation du thème A dans les motifs de conclusion de ce 2ème couplet :
Cela permet d'éviter une répétition complète du refrain avant de reprendre le thème B mesure 188 (remarquable rupture du discours mesures 218 à 222). Le thème est ensuite répété entièrement et est suivi d'une coda très développée qui à mon avis commence mesure 301. Ce finale d'une écoute plutôt "gouleyante" est en fait extrêmement élaboré, sa forme évoquant le finale du quatuor avec piano KV 493 et d'autres concertos pour piano. Il est une conclusion certes prématurée mais étourdissante de l'œuvre instrumentale de Mozart.
Encore merci à Jean-Pierre pour m'avoir autorisé à partager avec vous son travail
vartan Andante
Nombre de messages : 95 Date d'inscription : 10/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Lun 9 Juin - 11:12
Super intéressant ! Je mets tout ça de côté.
Bon, en même temps, ce concerto serait sûrement très bien si on remplaçait la clarinette par une flûteun thérémine un violon.
Stadler Administrateur
Nombre de messages : 1328 Age : 54 Localisation : Gembloux (Belgique) Date d'inscription : 07/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Lun 9 Juin - 11:13
vartan a écrit:
Bon, en même temps, ce concerto serait sûrement très bien si on remplaçait la clarinette par une flûteun thérémine un violon.
Voire un pipeau
oracid Lento
Nombre de messages : 9 Date d'inscription : 07/07/2008
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mar 8 Juil - 21:01
Bonsoir, Je suis très impréssionné par toute cette érudition. Bien que débutant j'ai commencé à étudier l'Adagio. Passons sur le massacre, je vous laisse imaginer, mais ce n'est pas mon sujet. J'ai acheté une partition du concerto version clarinette en Sib édité chez Gérard Billaudot. L'Allégro est en Do majeur, l'Adagio en Fa majeur(sib à la clef) et le Rondo en Do majeur également. Ces tonalitées sont également reprises aux Editions Peterr. Admettons ici que ce concerto ait été écrit en La majeur et qu'il est traditionnellement éxécuté avec une clarinette en La. Ma question est pourquoi l'Adagio est-il en Fa majeur, l'Allegro et le Rondo en Do majeur. Comment en est-on arrivé là. Merci de faire une réponse la plus simple possible. Il est 23h. Bonsoir.
Stadler Administrateur
Nombre de messages : 1328 Age : 54 Localisation : Gembloux (Belgique) Date d'inscription : 07/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 9 Juil - 8:16
oracid a écrit:
L'Allégro est en Do majeur, l'Adagio en Fa majeur(sib à la clef) et le Rondo en Do majeur également.
Parles-tu de la partie de clarinette ou de l'accompagnement ?
Dans la version pour clarinette en La, la partie de clarinette est en Do majeur (mvts 1 et 3) et en Fa majeur (mvt 2), alors que l'accompagnement est en La majeur (mvts 1 et 3) et en Ré majeur (mvt 2). C'est la tonalité de l'accompagnement (sur instruments en Ut) qui donne la tonalité du morceau puisque c'est la tonalité entendue.
Comme l'a précisé Jean-Pierre :
Citation :
L'adagio en ré majeur (ton de la sous-dominante de la majeur, le passage à la sous-dominante étant habituel mais non systématique pour les mouvements lents mozartiens)
Stadler Administrateur
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Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 9 Juil - 8:44
Stadler a écrit:
oracid a écrit:
L'Allégro est en Do majeur, l'Adagio en Fa majeur(sib à la clef) et le Rondo en Do majeur également.
Parles-tu de la partie de clarinette ou de l'accompagnement ?
Je m'auto-cite
Ayant fait un petit tour sur le net, j'ai pu constater que dans la version pour clarinette en Si bémol, la partition de clarinette reste la même. C'est l'accompagnement qui diffère.
Donc, le Concerto en La majeur devient un Concerto en Si bémol majeur (2 bémols à la clé à l'accompagnement pour les mvts 1 et 2), avec modulation en Mi bémol majeur (3 bémols à la clé pour le mvt 2).
Si on avait dû garder la tonalité de La majeur, tu aurais eu 5 # à la clé pour la partition de clarinette Sib (et 4 # pour l'Adagio).
oracid Lento
Nombre de messages : 9 Date d'inscription : 07/07/2008
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 9 Juil - 20:27
Bonsoir, bien entendu je parle de la clarinette. Donc si je comprend bien, que ce soit la clarinette en La en en Sib, la tonalité est la même, soit Do maj. pour l'Allegro, Fa maj pour l'Adagio et Do maj. pour le Rondo. Dans ma partition (Billaudot) l'accompagnement au piano est en Sib, Mib et Sib. Cela me parait logique puisqu'on est un ton en dessous. Par contre chez Peters le piano est respectivement en La maj, Ré maj et La maj. pour des tonalités à la clarinette identiques. Sur le net, j'ai également vu pour l'Adagio et pour la clarinette, Mi maj, Ré maj. Je suis d'accord avec Stadler, c'est la tonalité de l'instrument en Ut qui donne le ton, en loccuence il s'agit du piano. Soit pour une clarinette en La, 1,5 ton au dessus, donc Do majeur. Peut-être que Mozart voulait simplifier le jeu de la clarinette au détriment des autres instruments. Bonsoir.
Stadler Administrateur
Nombre de messages : 1328 Age : 54 Localisation : Gembloux (Belgique) Date d'inscription : 07/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Jeu 10 Juil - 7:01
oracid a écrit:
Par contre chez Peters le piano est respectivement en La maj, Ré maj et La maj. pour des tonalités à la clarinette identiques.
Alors ce doit être pour une clarinette en La
yvonne Andante
Nombre de messages : 61 Age : 80 Localisation : Grand-Leez, be Date d'inscription : 15/09/2008
Sujet: Concerto pour Clarinette .K.V 622 Mer 17 Sep - 10:32
Et oui Mozart!
Merci pour toutes ces références. yvonne
ismo Allegretto
Nombre de messages : 111 Age : 47 Date d'inscription : 22/11/2007
Sujet: K622? Mer 4 Mar - 17:51
Le concerto pour clarinette et orquestre de Mozart en K622. J'aime beaucoup! Mais que veut dire K622? Je me suis toujours posé cette question... J'aime beaucoup la musique classique! J'en écoute très souvent et pas que pour la clarinette. Et je n'y connais pas grand chose C'est une question qui me taraude. Celà indique t-il le n° de la composition? Ou autre chose...?
Stadler Administrateur
Nombre de messages : 1328 Age : 54 Localisation : Gembloux (Belgique) Date d'inscription : 07/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 4 Mar - 20:01
Le catalogue Köchel est un inventaire quasi chronologique des œuvres de Wolfgang Amadeus Mozart, dressé par Ludwig von Köchel puis complété après sa mort par d'autres spécialistes.
Le catalogue va jusqu'au KV 626 (ou K 626) qui est le Requiem.
Le Concerto pour clarinette porte le KV 622.
Pour plus de détails sur ce catalogue : Article sur Wikipédia
Voilà
PS : je fusionne avec le sujet sur ce Concerto
ismo Allegretto
Nombre de messages : 111 Age : 47 Date d'inscription : 22/11/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 4 Mar - 20:53
J'avais presque visé juste Je me demande bien pourquoi ils ont choisis la lettre K?(ptit soucis du détail) Je ne connaissais le catalogue de Köchel... C'est bien que ces gens là se soit donné cette peine. L'ordre c'est bien! Ca fait un peu snob... Du moins c'était l'impréssion que celà me donnait en écoutant la présentatrice à la radio "En K six cent vingt deuuux avec cette voix grave..." Mais j'adore ce concerto! Il me fait rappeler Michel Portal dans ce fameux reportage que l'on a parlé dans un autre topic. J'ai adoré les jeux de roles concernant chaques instruments dans ce fameux concerto. J'ai vu cette musique sous un angle que je n'aurai jamais soupçonné. C'est un grand monsieur. Et il a un son subliiiime Merci Stadler
Ps:je me soigne toujours... Maladie Goodmanienne
Stadler Administrateur
Nombre de messages : 1328 Age : 54 Localisation : Gembloux (Belgique) Date d'inscription : 07/03/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 4 Mar - 21:40
ismo a écrit:
Je me demande bien pourquoi ils ont choisis la lettre K?(ptit soucis du détail)
K comme Koechel, tout simplement
ismo Allegretto
Nombre de messages : 111 Age : 47 Date d'inscription : 22/11/2007
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Mer 4 Mar - 22:36
Stadler a écrit:
ismo a écrit:
Je me demande bien pourquoi ils ont choisis la lettre K?(ptit soucis du détail)
K comme Koechel, tout simplement
Baaahhh voui... Bien sûr...
007 Andante
Nombre de messages : 67 Localisation : Lorraine, les Vosges, La Bresse Date d'inscription : 26/02/2009
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Jeu 5 Mar - 15:55
pas plutot K comme Klarinette en allemand
ismo Allegretto
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Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Jeu 5 Mar - 18:17
gusty a écrit:
pas plutot K comme Klarinette en allemand
Pourquoi Pas?!!
Carole Lento
Nombre de messages : 8 Age : 50 Localisation : Gatineau - Québec - CANADA Date d'inscription : 30/05/2009
Qui peut me dire quelle sorte de clarinette est-ce sur la 1ere vidéo ?
Sharon Kam j'adore. Et le fait qu'elle bouge bcp m'impressionne encore plus ;-) Le bras et l'épaule gauche apparemment quand ça bouge c'est l'expression musicale qui s'exprime me disait mon 1er prof.
Et merci pour la signification de KV j'ai appris un super truc là !
lou Allegretto
Nombre de messages : 193 Age : 40 Localisation : 17 Date d'inscription : 19/06/2009
Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791) Ven 26 Juin - 18:44
Et quand c'est l'épaule et le bras droits ?
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Sujet: Re: Mozart - Concerto pour clarinette KV 622 (1791)